Cartas al hijo de Luis Rafael
16 avril
Compte-rendu de lecture par Paul-Henri Giraud de : Cartas al hijo, Luis Rafael, éditions Elogio del Horizonte, 2007, 79 p
Le dernier recueil de poèmes de Luis Rafael (Güines, Cuba, 1974) est une sorte de trait d’union entre le Vieux Monde, où le poète habite, et le Nouveau, où vit sa famille et, symboliquement, le « fils » à qui sont envoyées ces lettres.
Du Vieux Monde défilent quelques toponymes : Paris, Athènes, le Caire, Damas, la Méditerranée ; du Nouveau, quelques noms, attendus — La Habana —, mais surtout des images familières, voire assumées comme conventionnelles ; car c’est d’un lieu commun dont on a le désir : « Las palmas / tópicas ». Le je poétique se définit lui-même comme un condamné au voyage entre ces deux mondes, un prisonnier de son avion et de l’espace infini qu’il traverse, tandis que, la diction hachée, le souffle comme entravé par l’altitude, s’énoncent vers à vers les paradoxes de sa nostalgie : « Aherrojado / Por el espacio / (Al otro confín / Del mundo) / Avionizo — / Distancias — / Anhelo / : El mantel / Criollo/ / La mesa/ / Magra — / Y bulliciosa / Sin pan/ / Sin vino / Acompañada ». Dans cette séparation qui équivaut à un demi-exil, le cercle familial fait l’objet de plusieurs poèmes particulièrement lumineux : « Niño riente / ríete siempre ». La compagnie érotique, quant à elle, est plus fugacement et nocturnement évoquée, dans une confidence douce-amère : « Huérfano / Cobijado / Me disuelvo en el cuerpo / Cándido/plácido / De la mujer de turno ». — ¿ Cándido ? ¿Plácido ? Dido complacida, aurait-on envie d’ajouter… Mais Énée continue son voyage.
À l’espace immobile et limité de l’île, éternisée dans son essence atmosphérique de soleil, de pluie tropicale, voire d’inondations, s’oppose la variété culturelle, sociale et politique des terres visités. Loin de l’île, l’Histoire bouge ou a bougé, pour le pire (au Proche et au Moyen Orient) et quelquefois pour le meilleur : « Berlín desmurallada / Sin muro / : Desarmada / Sin armas / : Transitada ». La nuit, les pensées du poète retournent vers son île, dans le vase clos de ses rêves ou de ses insomnies, dans la bulle irisée d’une parenthèse qui s’envole : « Cada noche / Vuelo / A mi tierra / Y a mi gente / (Aletean en plata / Peces — / Ojos idos) ».
Pages d’introversion ou de vagabondages, ces textes forment, en fin de compte, un livre ouvert : « au fils », au lecteur et à l’avenir.
Paul-Henri Giraud
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